Issu du Mouvman Kiltirèl du même nom, créé à la fin des années 1970 par des militants indépendantistes, Akiyo est devenu le groupe emblématique du gwoka guadeloupéen en une trentaine d’années de chants engagés, résistants. Ses fondateurs, les frères Joël et Patrick Nankin, Michel Halley, Jean-Pierre Coquerel, rejoints plus tard par François Ladrezeau (Fanswa Ladrezo), ont révolutionné le carnaval de Pointe-à-Pitre par leurs costumes, leurs maquillages impressionnants, mimant souvent les affres de l’esclavage avec fouet et casque colonial pour les maîtres européens, feuilles de bananiers séchées pour habiller les déportés africains, alors que les tambours ka battent des rythmes sans âge, farouches et prenants. On retrouve cette énergie sans faille dans la plupart de cette quinzaine de morceaux parmi les meilleurs, réunis sur ce recueil sorti en 2005 où le gwoka se mêle au mas a Sen Jan (masque à Saint-Jean), musique en tambours des défilés à pied dans le carnaval.
Il faut oublier la jaquette du CD sans intérêt, sans indication, sans traduction, et aller à l’essentiel : des compositions de gwoka vigoureuses, des voix hors du temps qui font la première grande partie du disque suivie par des mélodies plus douces où intervient souvent le synthé comme dans Jaden, des rythmes plus variés accompagnent des ka clairs, percutants, Krak où s’entendent les clochettes. Ou encore Two loin, une chanson féminine qui prend des accents un peu biguine, un peu zouk. Mais, la forte émotion vient de chants tel Mwa bout qui commence a cappella comme une incantation avant que les tambours épaulés par les secousses du chacha portent avec vitalité son engagement social, ses revendications économiques. La même transe imprègne Pa zingé, Il alé, Sen Jan, des tubes d’Akiyo comme Ki moun, qui évoque l’Afrique, du Nord au Sud.
Par David Marif | akhaba.com